mardi 8 novembre 2011

Eglise Saint Bernard De La Chapelle A Montmartre

11 rue Affre


Dès 1845, le développement du village de La Chapelle, dû en grande partie à la construction du chemin de fer du Nord, entraîne d’une part l’inauguration d’une nouvelle mairie et de l’autre la création d’un nouveau lieu de culte pour la communauté catholique. Saint-Denis de la Chapelle dans le faubourg de Gloire s’avère trop éloignée et trop exiguë pour cette population de la Goutte d’Or.  Neuf ans plus tard, le conseil municipal décide d’obtenir une déclaration d’utilité publique pour une église dans l’axe de la rue Cavé. Et, en outre, l’ouverture d’une rue entre la rue des Cinq Moulins (actuelle Stephenson) et la Grande Rue (actuelle Max Dormoy) avec l’établissement d’un pont au-dessus du chemin de fer. La décision sera prise de construire l’église, sur le terrain de la butte Fauvet, en bordure de la rue d’Alger (actuelle rue Affre).
Après avoir hésité entre deux projets, le premier conçu par Lequeux, l’architecte de  Notre Dame de Clignancourt qui prévoyait une église romane et le second, celui d’Auguste-Joseph Magne (1816-1885), le projet retenu, celui de  Magne, est plus que d’inspiration néo-gothique (du XIVe siècle) et donne souvent aux visiteurs une fausse impression de la date de sa construction... sa façade devait être plate.
Sa construction commence en 1858, elle est terminée en 1862. Prévue pour le village de La Chapelle, pendant sa construction, le village fut intégré à Paris, aussi, la municipalité parisienne offrit-elle en cadeau de bienvenue un porche pour l’église.
Sous le second empire, elle sera décorée par les peintres Bonnegrâce,  Dauban, Claudius Jacquand et Robert Fleury
Cette église est ouverte au culte, le 29 novembre 1861 (le baron Michel de Trétaigne étant toujours maire malgré l’annexion), en devenant l’église paroissiale officielle de La Chapelle, destituant de ce fait Saint-Denis. Tout le clergé devint celui de Saint-Bernard, où sont transférées les archives. La façade présente un porche de style flamboyant, rehaussé d’arcs en accolade et épaulé par des arcs-boutants.
Dans la particularité de cet édifice, les chapiteaux décorés de sculptures à l’effigie des personnages les plus importants de la commune de La Chapelle : le maire Hébert, mort dès la pose de la première pierre, tout son conseil municipal, l’agent voyer de la commune, le curé ; l’architecte quant à lui, sur le quatorzième pilier, préféra faire figurer un ornement plutôt que son masque.
Les statues des saintes quant à elles, ont pris pour modèles les jolis minois de joyeuses filles croqueuses de pommes, faisant dire à l’historien Firmin Leclerc désignant l’une d’elles :
Je l’aimais ange, je l’adore sainte
Le clocher, dont la flèche s’élève à 60 mètres, a été dépourvu de cloches. En effet, lorsque pour la première fois, elles sonnèrent, elles ébranlèrent le clocher qui en garde un air penché. Pour éviter tout incident, elles ont été transférées à saint Augustin. Le clocher, réparé, reçu ensuite leurs remplaçantes : Eugénie, de 461kg ; Thérèse, de 321kg et Marguerite de 217kg, distribuant à toutes oreilles sol dièse, la dièse,  si naturel.
A l’intérieur, le grand orgue réalisé dans les ateliers  de Cavaillé-Coll, alors à l‘apogée de sa renommée mondiale, est construit en 1865 par un des plus grands maîtres organistes du temps, Alexis Chauvet, qui termina sa carrière et sa vie à la Trinité, à 31 ans, en 1871. Cet orgue magnifique est muet, faute d’entretien. Buffet d’orgue, de style néogothique, est rehaussé de sculptures d’ornement dues à H. Parfait et de figures d’anges par Michel Pascal.
La nef, comportant quatre travées est flanquée de bas-côtés et de quatre chapelles. Les voûtes reposent sur des croisées d’ogives. Les grandes arcades en cintre brisé sont surmontées d’un triforium, puis de fenêtres hautes. De chaque côté du chœur, les deux retables sont l’œuvre de Geoffroy Dechaume (1816-1892) , collaborateur de David d’Angers. Ils évoquent la vie de St Bernard de Clairvaux et de Ste Geneviève. Dans le chœur, le maître-autel est agrémenté d’un bas-relief réalisé par Michel Pascal : le Christ et les Evangélistes. Les stalles en bois de chêne ont été sculptées par H. Parfait dans le style néolithique. 

L’évolution du quartier de la Goutte d’Or, des Maghrébins aux Africains, et les projets de réhabilitation en cours ont causé de tels bouleversements dans la population que la fréquentation de cette église a fortement diminuée.
Comme la population islamique a pris souche, malgré les brassages ethniques, des musulmans sont venus demander au prêtre, Ailloli, doyen du 18ème dans les années 1980, de leur laisser l’édifice pour le transformer en mosquée.

Cette église a été rendue célèbre en accueillant 300 africains sans papiers entre le 26 juin et le 23 août 1996, date de leur expulsion.

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