lundi 7 novembre 2011

Eglise Saint Pierre De Montmartre

Porte d'entrée droite de l'Eglise
 2 rue du Mont-Cenis      métro Abbesses



L’architecte en est inconnu, mais c’est sans nul doute la plus ancienne église de Paris. Presque tous les historiens s’accordent à dire que ce fut sûrement un lieu de culte celtique, puis un lieu de culte romain avec un temple dédié à Mercure. L’endroit voit, dès l’époque mérovingienne, une église chrétienne qui fut détruite par les Normands lors des grandes invasions à la fin du IXème siècle. Reconstruite, elle fut de nouveau détruite par un ouragan en 944
 L'Autel

C’est ici que se trouve, distincte de la chapelle du Saint-Martyre, qui était située sur le versant méridional de la Butte, du côté de Paris, l’église Saint-Pierre de Montmartre. Lorsque Louis VI Le Gros ordonna, en 1133, l’édification d’un monastère sur le haut de la butte, sur les instances de la reine, il pensa aux besoins religieux des laïcs habitant cet endroit. Un seul bâtiment pouvait suffire pour les laïcs et les religieuses. L’église construite fut donc doublée, un mur élevé à hauteur de la fin de la troisième travée la séparait en deux parties, l’une, côté façade, fut l’église de la paroisse ( l’église saint Pierre) et l’autre, côté chœur, la chapelle du couvent ( la chapelle Saint-Denis). Ce bâtiment commencé en 1133, fut terminé en 1147. il constitue la plus vieille église de Paris. L’église sera consacrée le 21 août 1147 par le pape Eugène III et par saint Bernard, abbé de Clervaux. Elle est alors séparée en deux parties, la première, abbatiale, consacrée à Notre Dame et à saint Denis, la seconde, paroissiale, placée sous le vocable de Saint-Pierre.

L’orgue, de 1868, provient de l’église Saint-Pierre-des-Arcis, jadis dans la cité. Construit par Cavaillé-Coll :
-          2 claviers manuels
-          12 jeux
Profondément remaniée depuis, l’église devint un temple de la Raison pendant la Révolution. La façade actuelle remplace depuis 1775, la vieille façade gothique de 1133, à trois pignons percés de baies circulaires lobées de trèfles à quatre feuilles. On remit à neuf, en 1461, le clocher, une partie de la charpente et la couverture.
Claude Chappe y fit, en 1793, ses premières expériences de télégraphie aérienne, dans une tour construite sur les voûtes de l’abside. Ce télégraphe fonctionna jusqu’en 1844.
Quatre colonnes de marbre noir (deux à l’entrée, encadrant l’orgue, deux dans le chœur) provenant d’un temple romain de la Butte dont deux se trouvent placés contre le mur du fond, les deux autres dans le chœur et six chapiteaux historiés de l’église ont longtemps intrigué les archéologues. S’agit-il de vestiges du temple de Mercure ? On l’a cru, mais des études récentes ont montré que les colonnes et les chapiteaux datent du VIIè siècle et proviennent, comme de nombreux sanctuaires parisiens de carrières de marbre du sud-ouest de la France. Le chapiteau le plus curieux de cette série (une petite tête humaine qui sort d’un vêtement singulier) est actuellement conservé au musée de Cluny
Sur l’emplacement et autour de l’église actuelle, on a découvert au siècle dernier, un cimetière mérovingien qui s’étendait à l’ouest du mur de clôture de l’église. Les cercueils en bois de la couche supérieure avaient disparus, mais, à côté des squelettes, se trouvaient des vases de terre jaune ornés de stries rouges qui renfermaient encore du charbon destiné à brûler l’encens. On exhuma ensuite des tombes plus anciennes, du VIè ou du VIIè siècle, rangées parallèlement les unes près des autres. Ces tombes en plâtre portaient des ornements à l’extérieur, et parfois à l’intérieur de murs parois. Elles occupaient une superficie d’une vingtaine de mètres carrés.
Les sarcophages de Saint-Pierre de Montmartre, semblables à ceux de la nécropole paléochrétienne du faubourg saint Marcel, renfermaient des ossements et de nombreux objets. L’un d’eux livra un squelette d’un véritable géant de 2,20m de stature.

Tombe de la Reine Adélaïde
Les objets qui accompagnaient les défunts témoignaient d’un travail raffiné : boucles et agrafes de cuivre rehaussées d’or, monnaies, colliers d’ambre et de pâte de verre multicolores. On a pensé que certaines de ces pièces d’art étaient d’origine scandinave et avaient pu être apportées lors des invasions normandes qui menacèrent Paris au IXè siècle. Mais il s’agit là, vraisemblablement d’œuvres très évoluées de l’époque mérovingienne.
Parmi les fragments de l’ancienne église se trouvait un antéfixe à masque humain en terre cuite, que l’on peut voir au musée Carnavalet
L’église Saint-Pierre de Montmartre passait à la fin du XIIIème siècle pour une des plus opulentes églises du diocèse de Paris. Les voûtes de la nef furent entièrement reconstruites en 1470. le terrible incendie de 1559 causa des dégâts si importants que l’on dut se contenter d’abriter les bas-côtés par de simples charpentes avec plafond.

Lorsque les religieuses descendirent à l’abbaye d’en bas, en 1686, les paroissiens de Saint-Pierre obtinrent l’agrandissement de leur église au détriment de celle des moniales ( chapelle Saint-Denis) en reportant plus près de chœur le mur de séparation, ne laissant aux religieuses que le chœur des Dames, nom donné à l’abside et aux 2 absidioles qu’elles se réservèrent pour quelques cérémonies et pour la sépulture de leurs abbesses. L’église Saint-Pierre, ainsi agrandi, bénéficia en outre, d’un clocher particulier édifié à l’extérieur contre la façade nord, mais il avait été bien spécifié qu’il serait moins haut que celui du Chœur des Dames, afin de marquer l’état de dépendance de la paroisse vis-à-vis de l’abbaye. Ce clocher fut démoli en 1850. Jusqu’à cette date, il semble donc qu’il y eut deux clochers.

Le télégraphe installé sur le haut de l'église
Cette église reste le lieu de prière des habitants de Montmartre. On venait y admirer les remarquables bénitiers créés par Desruelles dans sa manufacture de Clignancourt, une vierge et un christ, œuvres de Pigalle, trois statues de Coustou t les figures de la tribune d’orgue composées par Mouchy et Caffieri
A la révolution, le Chœur des Dames fut désaffecté et toutes ses richesses dispersées.
L’église Saint-Pierre connut une existence mouvementée. Elle ne fut pas vendue, étant paroissiale, mais on la ferma de 1793 à 1795. Mais les habitants de Montmartre, réticents, continuèrent, malgré tout à venir prier là où leurs ancêtres manifestaient leur foi depuis des siècles, et l’on dut en 1799, rouvrir l’église au culte et y rétablir un curé desservant.
En 1794, on avait surmonté le Chœur des Dames, toujours désaffecté, d’une tour où fut installé par Chappe un télégraphe optique, qui, jusqu’en 1844, transmit les nouvelles entre Paris et Lille. Un incendie le détruisit entièrement, mais la tour ne fut démolit qu’en 1866, laissant de vastes lézardes sur les murs et un affaissement général des voûtes qu’il fallut étayer. Ces différentes raisons firent que jusqu’en 1900 le Chœur des Dames resta séparé du reste de l’église par une cloison, à l’endroit où une grande grille séparait déjà sous l’Ancien Régime, l’église paroissiale et l’église abbatiale


Au début du XIXème, de l’autre côté de la cloison, murs et voûtes menaçaient également de ruine, et l’on faillit se résoudre, pour effectuer quelques travaux urgents, à un détestable marché : en 1806, le conseil de fabrique obtenant l’autorisation de faire quelques réparations pour un devis de 3.880francs. mais une fois les travaux effectués, l’Etat et ma municipalité de Montmartre se refusèrent à payer. Le conseil de fabrique décida alors de vendre les quatre colonnes antiques, dont le duc de Choiseul-Gouffier offrait 800francs pour les remplacer par des colonnes « neuves en bonne pierre ». Fort heureusement, les ingénieurs des Ponts et Chaussées, consultés par le sous-préfet de Saint-Denis, déclarèrent les colonnes indispensables à la solidité de l’édifice. On faisait alors rigoureusement fi de toute considération artistique ou archéologique.
Les dégradations ne s’arrêtèrent pas pour autant. En 1811, l’église prenait l’eau par les bas-côtés. En 1814, les troupes alliées, installées sur la Butte, établir dans une absidiole un four à pain et firent de l’église un magasin de vivres. Ils enlevèrent aussi tous les plombs qui sur les toits et les bas-côtés servaient à l’écoulement des eaux. Secours et imposition extraordinaires permirent encore quelques travaux de soutènement et même de refaire la façade méridionale et les deux croisillons.
Sa vétusté était devenue telle en 1856 que Mérimée, inspecteur des monuments historiques et son adjoint, l’architecte Abadie conseillèrent sa destruction : « De tous côtés (…) les murs latéraux sont fortement lézardés et déversés. La voûte est crevassée et les clefs des nervures semblent près de se détacher. Dans le siècle dernier on a détruit la partie saillante de quelques piliers de la nef. Il en résulte une rupture et un déversement qu’on s’est efforcé d’arrêter en ajoutant des pierres du côté opposé. Le mouvement continue toujours et l’enduit en plâtre tout moderne est déjà couvert de fissures prolongées. La tour à gauche du portail est inclinée en dehors comme si elle était poussée par l’église. Les murs sont salpêtrés et les pierres se délitent de tous les côtés. » Concluant avec un pessimisme qui cadrait mal avec son rôle officiel de protecteur des Monuments Historiques, l’auteur de Carmen ajoutait : « Cet édifice est un de ceux qu’il faut se résigner à voir périr ».
 Mais il ne fut pas donné suite à ce projet. Le jour arriva où il devint impératif de la fermer, son effondrement menaçant la vie des fidèles. On dut même, en 1857, construire en avant de l’église, du côté de la place du Tertre, une chapelle provisoire dite « des catéchismes » dédiée à Notre Dame de Lourdes. Cette chapelle à voûte de plâtre en berceau cintré, offrit jusqu’à la fin du XIXème siècle un abri secourable mais indigne aux paroissiens de Montmartre qui attendaient la restauration de Saint-Pierre.
En 1899, des artistes de Montmartre, dont Willette, décidèrent d’offrir au conseiller municipal Eugène Fournière, socialiste et anticlérical notoire, un « bon déjeuner », à la suite duquel, ils le convainquirent de demander à la Ville les crédits nécessaires à la restauration de l’église Saint-Pierre dont le maintien, lui dit-on, « jouerait un tour au Sacré-Cœur » alors en construction. Ainsi fut fait. Les crédits furent obtenus et l’église Saint-Pierre, surnommée un instant, « Notre-Dame-de-Fournière », fut reprise, détail par détail, réparée complètement et remise en son état actuel par Sauvageot, ancien lève de Viollet-le-Duc. L’Académie des inscriptions et Belles lettres, les historiens de Paris, les amis de Montmartre, artistes, gens de lettres et gens de théâtre s’émurent également et joignirent leurs voix à celles des artistes de Montmartre  et saisirent officiellement le Service des Monuments Historiques
Le projet de Sauvageot fut adopté par le ministère des Beaux-Arts le 26 janvier 1899. le montant de la remise en état, soit 300.000 francs fut partagé entre l’Etat et la Ville de Paris. Les travaux débutèrent en 1900. la restauration fut radicale. Ainsi pourtant fut sauvé l’un des édifices religieux les plus vénérables et les plus émouvants de l’histoire de Montmartre
Elle rouvrit ses portes en 1908; le Chœur des Dames, pareillement restauré, lui fut adjoint.
Sauvageot trouva dans l’église Saint-Pierre plusieurs pierres tombales d’abbesses. On voit à gauche de la porte de la sacristie, un fragment de la dalle ayant fait partie du tombeau de la fondatrice de l’église, la reine Adélaïde de Savoie, décédée en 1154 et enterrée alors devant le maître-autel du Chœur des Dames, elle a été placée derrière le maître-autel, ultime hommage rendu à la fondatrice de l’abbaye. Son effigie porte la couronne royale à trois fleurons en usage au XIIè siècle. L’abbesse Françoise-Renée de Lorraine avait fait restaurer, vers 1650, son tombeau sur lequel fut gravée une inscription en hommage à « l’illustre et très pieuse Princesse Madame Alix de Savoye, Reine de France… »
On voit dans l’absidiole nord (celle de gauche) deux autres pierres tombales : celle d’Antoinette Auger, abbesse de 1518 à 1539, et de Catherine de La Rochefoucault de Cousage, abbesse de 1735 à 1760. L’absidiole sud contient aussi deux pierres tombales d’abbesses, la première est celle d’Ade de Mincy (1317), la seconde, en plusieurs morceaux, représente une effigie d’abbesse, debout dans une baie gothique entre des fleurs de lys, tenant d’une main une crosse, de l’autre un missel à fermoir; c’est la pierre tombale de Mahaut de Fresnoy, qui mourut en janvier 1280 celle aussi dit-on de la dernière abbesse, Louise-Marie de Montmorency-Laval, guillotinée en 1794 mais cela semble improbable, car Louise-Marie e Momtmorency-Laval fut guillotinée et son corps jeté avec ceux des autres condamnés dans une fosse commune creusé dans le sable d’une ancienne carrière, sur le chemin de Sait-Mandé, à côté des ruines du monastère des Augustins de Picpus. C’est là que sont encore conservés les restes des 1.436 victimes guillotinées à la barrière du Trône, du 14 juin au 27 juillet 1794

Une cuve baptismale oblongue en pierre a sans doute fait partie du mobilier originel de l’église. Elle porte, sur un côté, le millésime de 1537, et de l’autre, un écusson avec deux clés en sautoir, armes de Saint-Pierre, patron de Montmartre. L’ornement de feuillages en rinceaux de style renaissance confirme la date de consécration de ce monument.

Il n’est pas besoin de s’attarder sur la façade occidentale de l’église, placage du dernier quart du XVIIIème siècle qui, selon Guilhermy, « conviendrait mieux à l’entrée d’un marché qu’à celle d’un temple chrétien ». Il remplace l’ancienne façade à triple pignon percée de baies cintrées, qui devait s’ouvrir sur le parvis par trois portes. On a en effet découvert lors de travaux en 1838, les traces d’une grande fenêtre au plein cintre avec ornements et frise à pointes de diamants. De même, on ne s’attardera pas sur la façade méridionale, presque entièrement reconstruite vers 1830 car des infiltrations d’eau avaient rongé la pierre.
Ce qui frappe en revanche, lorsqu’on pénètre dans l’église, c’est l’extrême simplicité du plan : une nef de quatre travées, flanquée de quatre bas-côtés réguliers, un transept et un chœur formé d’une abside en hémicycle et de deux absidioles en cul-de-four. Voilà le plan caractéristique d’une église romane dont l’axe rectiligne donne à penser qu’elle a été construite probablement au moment où l’abbaye fut fondée par Louis VI et Adélaïde de Savoie. L’Abside, sans doute voûtée en cul-de-four, a du être entièrement reconstruite à la fin du XIIème siècle.
Elle a la particularité d’être pentagonale à l’intérieur et arrondie à l’extérieur. Les piles formant le carré u transept datent sans doute du XIIème puisqu’elles font corps avec le mur des absidioles qu’elles soutiennent. La voûte a du être refaite à la fin du XVème siècle car son attache sur les colonnettes est extrêmement maladroite et atteste qu’elle a remplacé la voûte primitive du XIIème siècle. Les deux croisillons du transept ont été entièrement refaits : celui du nord par Sauvageot et celui du sud par l’architecte Millet en 1874. Le premier a retrouvé sa dimension originale en appui sur la tour du clocher, alors que la restauration de 1874 est beaucoup plus fantaisiste, l’architecte ayant utilisé des voûtes d’ogives qui ne se justifient absolument pas.
En 1953, Max Ingrad a dessiné de beaux vitraux pour remplacer ceux qui avaient été soufflé par les bombardements de la dernière guerre.
Au centre, l’autel en cuivre émaillé de Jean-Paul Froidevaux fut consacré le 1er avril 1977.
Trois tableaux décorent le chœur : le Reniement de saint Pierre de l’école du Guerchin, La descente de croix de José Ribeira, le Christ au mont des Oliviers de Joseph-François Parrocel.
Sur la façade, trois portes de bronze exécutées en 1980 par Tommaso Gismondi représentent les saints patrons de l’église : saint-Pierre au centre, Notre-Dame à droite et Saint-Denis à gauche.

Le parvis était autrefois occupé par l’ancien cimetière de la paroisse. La Croix-Cottin, provenant du cimetière de La Chapelle-saint-Denis, supprimé en 1878, y fut érigée.

Au sud  de l’église, les grillent dissimulent le jardin du Calvaire. Les bâtiments conventuels et le cloître s’étendaient dans cet enclos limité approximativement par la rue Cardinal Dubois. Sous la cour du cloître, un puisard collectait et épurait les eaux pluviales pour former une nappe phréatique artificielle. Une pompe actionnée sur un puits encore visible de nos jours fournissait l’eau à l’abbaye

C’est devant cette église, sur la place saint Pierre que Gambetta s’envolera en ballon pour aller chercher des renforts contre les Prussiens.




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