samedi 19 novembre 2011

Poulbot


La Maison de Poulbot Avenue Junot
Poulbot est né à Saint-Denis où ses parents étaient instituteurs. Il avait appris à connaître la Butte tout enfant, en y venant polissonner le jeudi. Il avait appris à en aimer le site et à en connaître les gens. Toute sa carrière fut employée à « raconter » le petit peuple de Montmartre, particulièrement les gosses dont il créa un type, les « Poulbots », morveux, guenilleux, rigolards et émouvants. Son crayon, certes, n’avait pas l’âpreté de celui de Steinlen, ni sa force percutante, mais ses dessins, ni sa force percutante, mais ses dessins étaient attendrissants et leurs légendes pleines d’un humour mélancolique.
D’abord installé dans une baraque du Maquis sur laquelle il devait se faire construire un bel hôtel, 13 avenue Junot. Il devint vite une des figures montmartroise. Bon vivant, gentil, généreux, il ne se contentait pas de « croquer » les mouflets de la Butte pour en faire rire les lecteurs conformistes du Journal. Il se consacrait vraiment à eux. Chaque jour, les gosses sortant de la communale venaient lui dire bonjour et jouer avec lui. Plus tard, il aménagea pour eux un minuscule parc d’attraction dans son jardin.
Comme il avait l’aptitude singulière d’organiser des défilés comiques, il était devenu l’imprésario des folies de la Butte. Ayant négligé longtemps  d’épouser Léona, sa compagne, mais ne voulant pas la frustrer du plaisir de la noce, il organisait chaque année pour l’anniversaire de leur rencontre une noce factice qui mettait tout le village en émoi. Après s’être fait friser, il endossait une redingote tandis que Léona revêtait une robe de mariée, avec voile et couronne de fleurs d’oranger. Les invités étaient costumés en curé, pasteur, garçons d’honneur, témoins, maire et .nourrices avec d’énormes seins en carton. Ainsi affublée toute la noce défilait derrière des violoneux dans les rues de la Butte, suivie de la marmaille en délire.
A force de répéter leur mariage Poulbot et Léona finirent par passer pour de bon devant monsieur le maire, mais n’abandonnèrent pas pour autant leur noce carnavalesque, et jusqu’à la guerre, en 1914, ils continuèrent à la célébrer chaque année.
L’une des fêtes, en mai 1913, devait prendre un caractère prémonitoire. Sous prétexte de reconstituer Les Dernières Cartouches, célèbre tableau d’Alphonse de Neuville qui retrace un épisode de la défense de Paris en 1870, il fit accourir dans son atelier transformé en cabaret une armée de zouave, de turcos, de marsouins, de garibaldiens, de cantinières et de filles à soldats en costume Second Empire. La fête pétarada toute la nuit et finit par essaimer dans les venelles du Maquis. A l’aube, le clairon sonna la charge et toute la troupe de rapins à laquelle une nuit de beuverie avait mis l’héroïsme au cœur, se précipita, sabre au clair, à l’assaut du Moulin de la Galette. L’émotion provoquée par cette charge fut telle que le bruit se répandit d’une invasion allemande. C n’était qu’anticiper d’un an, et nombre de joyeux piou-piou de cette générale ne revinrent jamais des tranchées. D’autres, comme Poulbot revinrent sérieusement handicapés. Atteint d’un éclat d’obus à la colonne vertébrale, il demeura paralysé des jambes et resta durant les trente dernières années de sa vie cloué dans un fauteuil roulant

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